HÉLIANTHUS 
AVOCAT
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Clause pénale - régime - réduction - application par le juge des référés

Le régime des clauses pénales est prévu par les articles 1226 à 1233 et 1252 à 1253 du code civil. Le code civil définit la clause pénale "comme celle par laquelle une personne, pour assurer l'exécution d'une convention, s'engage à quelque chose en cas d'inexécution".

Par exemple, en cas de non paiement de son loyer, le locataire s'engage à payer à son bailleur une indemnité égale au loyer augmenté de 10%. Il s'agit habituellement d'une majoration ou d'une somme forfaitaire dont le juge du fond peut diminuer le montant soit que l'exécution partielle de l'obligation a procuré un avantage au créancier (art. 1231 du code civil) soit que son montant est manifestement excessif (article 1152 du code civil).

Le caractère manifestement excessif d'une clause pénale s'apprécie en comparant son montant avec le préjudice effectivement subi par le créancier. Le juge du fond fixe souvrainement le montant auquel la clause pénale doit être réduite ou éventuellement réévaluée si son montant est manifestement dérisoire ; ce qui est une hypothèse d'école. Il faut néanmoins préciser que le juge du fond n'est pas tenu de limiter le montant de la clause pénale au seul préjudice effectivement enduré par le créancier et que la clause pénale dont le montant a été révisé ne peut être inférieur au préjudice effectivement subi.

Le juge du fond n'est jamais tenu de modérer une clause pénale, il s'agit d'une faculté qui lui est ouverte par la loi et qui peut être mise en oeuvre d'office. Toute clause de nature à interdire au juge la révision du montant d'une clause pénale est réputée non écrite. Une clause pénale peut être réputée non écrite si elle est déclarée abusive dans un rapport de professionnel à consommateur conformément à l'article L132-1 du code de la consommation.

A été déclarée abusive une clause prévoyant la majoration d'office d'un loyer ou l'attribution immédiate au bailleur du dépôt de garantie en cas de non paiement des loyers par le locataire (CA PARIS, 26 juin 2008, loyers et coprorpiété 2008, n°180, obs. Vial-Perdoletti). Une ordonnance du juge des référés statuant sur une demande d'expulsion formulée par un bailleur contre un locataire vient de me parvenir et suscite de ma part une réflexion sur l'application par le juge des référés des clauses pénales et sur la faculté que le juge des référés a d'allouer au bailleur une provision sur celles-là.

En l'espèce, le juge des référés a constaté l'acquisition de la clause résolutoire, a prononcé l'expulsion du locataire avec le concours de la force publique, a condamné le locataire au paiement des loyers impayés et au paiement d'une indemnité d'occupation égale au montant des loyers, l'a condamné au dépens de l'instance et à payer 700€ d'indemnité de procédure. Le bailleur avait demandé aussi l'application de trois clauses pénales qui figuraient au bail authentique mais le juge des référés a refusé d'en faire application au motif que : " Les demandes formées au titre des majorations de loyer et majoration du taux d'intérêt s'analysent comme des clauses pénales. Il n'appartient pas au juge des référés de faire droit à de telles demandes, dans la mesure où elles présentent un caractère indemnitaire et où les clauses pénales sont susceptibles d'être réduites par le juge du fond". 

La motivation adoptée par le juge des référés est critiquable, même si, dans le cas précis, le cumul des trois clauses pénales paraissait manifestement excessif, inspiré par un esprit comminatoire et donc susceptible de faire l'objet d'une réduction. Le caractère révisable d'une clause pénale n'est pas un obstacle à l'allocation d'une provision. La Cour de Cassation a eu l'occasion de se prononcer clairement sur ce point et il faut observer que la motivation de la juridiction des référés est en contradiction avec la position de la Cour Suprême : "Le pouvoir du juge du fond de modifier les indemnités conventionnelles n'exclut pas celui du juge des référés d'allouer une provision  sur le montant de la clause pénale quand la dette n'est pas contestable"   (Cass. Civ. 2ème, 10 juillet 1978, JCP 1980. II. 19355 note E-M BEY, Cass. Com. 1er mars 1983, GP. 1983.2.533, note E-M BEY, Cass. Civ. 3ème, 29 juin 1983, Bull. Civ. III, n°153). 

Le juge des référés saisi sur le fondement de l'article 809 alinéa 2 du code de procédure civile pouvait opposer le caractère contestable du montant des clauses pénales pour refuser d'en faire application, puisque, a contrario, il lui est possible d'allouer une provision sur une clause pénale dont le montant n'est pas contestable (cass. civ. 3ème, 19 février 2003, bull. civ. III n°153 p. 119) sur le fondement de ce même texte.

Toutefois, il n'appartient pas au juge des référés de réviser le montant d'une clause pénale en raison de l'avantage qu'une exécution partielle a procuré au créancier, point précisé par l'arrêt précité. Enfin et cela doit être souligné car il est des mirages de fortune qui se créent dans l'âme des créanciers à la lecture de leur contrat : le fait que la convention soit agrémentée de très nombreuses clauses pénales toutes plus importantes les unes que les autres ne doit pas faire croire que le juge les validera car elles ont là un caractère essentiellement comminatoire qui n'a pas pour finalité de ruiner le débiteur défaillant mais seulement de lui donner envie de bien exécuter son obligation sous peine de sanction. En pratique, le juge du fond peut notablement réduire le montant des clauses pénales en mettant en oeuvre le pouvoir modérateur que lui confère la loi.

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