HÉLIANTHUS 
AVOCAT
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TESTAMENT OLOGRAPHE

LE TESTAMENT OLOGRAPHE
PREAMBULE :

Olographe ou holographe puisque les deux s’écrivent, vient du grec olos « entier » et graphein « écrire » autrement dit, écrit en entier de la main de son auteur.
L’article 970 du code civil dispose : « le testament olographe ne sera point valable, s’il n’est écrit en entier, daté et signé de la main du testateur : il n’est assujetti à d’autres formes ».
La forme olographe est la moins sophistiquée et aussi la plus répandue. L’article 970 du code civil a plus de 200 ans et n’a pas été modifié, il a donné lieu à de nombreuses décisions et interprétations.
 
I. Le testament olographe avant le code civil

 
a. Pays de coutumes et de droit germanique

 
Pothier écrit dans son commentaire des Coutumes, des duché, baillage et prévôté d’Orléans : « la forme de l’olographe consiste en ce qu’il doit être écrit en entier et signé de la main du testateur.

L’ordonnance, article 38, y requiert aussi la date du jour, du mois et de l’année. Il a été jugé qu’un testament daté du Vendredi-Saint de l’an 1756, était valable : car le jour et le mois auquel tombe le Vendredi-Saint étant constant, cette expression renferme la date du jour et du mois.

La date peut être écrite en chiffre, quoiqu’il soit mieux de l’écrire en lettres.

La signature doit être à la fin de l’acte dont elle est le complément, c’est pourquoi un post-scriptum après la signature est nul, s’il n’est aussi signé.

Les interlignes ne sont pas défendus, pourvu qu’ils soient de la main du testateur.

Les ratures des mots qui ne sont essentielles ne sont d’aucune considération. Si c’était le nom du légataire ou de la chose léguée qui fut raturé, la rature serait une preuve de la révocation du legs, mais le surplus du testament n’en devrait pas moins subsister. Cela est hors de doute, lorsque ce qui est raturé se peut lire. S’il y avait surtout à la fin du testament plusieurs lignes raturées de manière qu’on ne pu les lire absolument et que le testament se fût trouvé après la mort du testateur, en la possession du légataire, il pourrait en résulter une fin de non-recevoir contre lui, qui l’exclurait du legs à lui fait par le testament ; parce que l’on pourrait soupçonner que les lignes raturées contenaient une révocation ou limitation desdits legs (…)

Une lettre missive, par laquelle une personne écrirait à quelqu’un qu’elle lui fait tel legs, quoiqu’écrite en entier, signée et datée de la main du testateur, ne peut passer pour un testament olographe, cette forme de tester étant expressément rejetée par l’ordonnance de 1735, art. 3 (en droit positif une pratique identique est valable).

Un testament olographe, pour pouvoir être exécuté, doit être déposé chez un notaire, soit du vivant soit à la mort du testateur. Il est utile qu’il le dépose de son vivant, et reconnaisse en le déposant, qu’il est entièrement écrit et signé de sa main, pour éviter après sa mort la procédure de reconnaissance de testament, qui sans cela serait nécessaire, si les héritiers ne voulaient par reconnaître l’écriture.

Le testament olographe d’une personne qui s’est faite religieuse, doit absolument être déposé avant sa profession ; ordonnance art. 21 ; ce qui a été ordonné pour empêcher que les religieux ne puissent faire de testament depuis leur profession, qu’ils antidateraient. » 
 

b. Pays de droit romain
 
Dans les pays de droit écrit, le testament olographe n’était pratiquement pas reconnu. 

L’ordonnance de 1735, art.19 avait respecté cette variété d’usage.

Le code civil a étendu la forme olographe à toute la France.

Planiol et Ripert faisaient observer que la forme olographe n’est pas sans inconvénient : elle rend plus facile la suggestion, la captation et la destruction ; elle permet des falsifications dont les expertises sont loin de donner des démonstrations sûres. Cependant elle est d’une grande commodité surtout pour les personnes malades qui n’ont pas toujours le temps ni les moyens de faire appeler un notaire et pour les personnes indécises ou timides, qui aiment à lire et relire leurs dispositions avant de les considérer comme définitives. Les préventions se sont peu à peu dissipées et le testament olographe a fini par entrer dans les habitudes. Il s’agit de nos jours de la forme la plus courante du testament (JOSSERAND, La désolennisation du testament, DH 1932 chr. p. 73).

Un testament olographe peut être établi par un sourd, par un aveugle sous réserve qu’il ne soit pas en braille, par un sourd-muet…il peut être rédigé en français ou en langue étrangère si le testateur la maîtrisait.
 

II. Le testament olographe en droit positif
 
 
  1. Le formalisme du testament olographe

 

a. Formalisme de validité (ad validitatem) mais non sacramentel

Le testament olographe n’est pas un acte solennel, il n’a pas à être établi ou dressé en la forme authentique par un officier ministériel ou un fonctionnaire de l’Etat ou un délégataire de l’autorité publique pour être valable, il suffit qu’il soit écrit de la main du testeur, qu’il soit daté et signé par l’intestat.

Le testament olographe n’est pas non-plus un acte sacramentel, c’est-à-dire qu’il n’a pas à satisfaire à une forme type ou à la reproduction d’une formule type pour valoir comme testament. Le sens et l’intelligence de l’acte, l’intention de tester l’« animus testandi » doit prévaloir sur toutes autres considérations formelles sous réserve des trois exigences posées par la loi « écrit, daté et signé  de la main du testateur ». Ainsi, une disposition testamentaire contenue dans un écrit ne mentionnant pas « Ceci est mon testament » ou « Voici mes dispositions de dernières volontés » ou toute autre formule type est valable en tant que testament dans la mesure où l’écrit exprime clairement l’intention de son auteur de transmettre un héritage à son décès.

Le Cour de Cassation à maintes fois rappelé que le testament olographe n’est pas un acte sacramentel. Dans un arrêt, la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence avait refusé de valider un testament contenu dans une lettre missive destinée à une notaire et contenant un projet de donation-partage au motif que : « le document litigieux a la forme d’une lettre et ne comporte aucun terme se référant à la nature testamentaire de cet écrit ». La Cour de Cassation casse l’arrêt au motif que : « en se déterminant ainsi, alors que la validité d’un testament n’implique pas l’emploi de termes sacramentels et qu’il appartient au juge, pour rechercher la volonté du rédacteur, d’interpréter l’acte au regard des éléments extrinsèques invoqués par les parties, la cour d’appel, qui omis de procéder aux recherches qui lui étaient demandées, n’a pas donné de base légale à sa décision » (Cass. Civ. 1ère, 11 janvier 2005, Bull. civ. I. n°24 p. 18). Dans cette affaire, il est reproché à la Cour d’Appel de ne pas avoir examiné l’intention de l’auteur de l’acte litigieux au regard de son contenu et de son contexte extérieur en l’écartant au motif qu’il avait la forme d’une lettre qui ne précisait pas qu’il s’agissait d’un acte de dernières volontés.     

L’olographe est un acte formaliste dont le non-respect de la forme est de nature à emporter la nullité du testament.

C’est un acte unilatéral et sous seing-privé mais la nullité n’est encourue que s’il apparaît que le vice fait douter du respect ou de la fidélité à la volonté de son auteur ou que le vice qui entache l’acte trahit une contrainte, une duperie, une suggestion, une insanité d’esprit, un abus de faiblesse du testateur ou que simplement l’acte testamentaire n’est pas de la main du testateur ou qu’il n’a pu l’être.

Ainsi selon les cas, le juge sauvera l’acte ou l’annulera d’où il résulte une grande diversité de décisions.

 
b. Ecrit de la main du testateur

Il faut que le document soit écrit de la main de son testateur en son entier, comme le texte ne précise pas si cette exigence s’applique aussi à la date, on doit considérer que la date doit aussi être écrite de la main du testateur, mais les juridictions sont souples sur la question de la date et se contentent que le moment où le testament a été rédigé puisse être déterminé avec suffisamment de précision.

Le testament qui n’est pas manuscrit est nul. C’est le cas du testament imprimé, dactylographié (Cass. Civ. 24 février 1932, S 1934.2.1 ; Cass. Civ. 18 mai 1936 - DH 1936.345).

L’écriture du testament doit être intelligible c’est-à-dire que la formation des lettres doit permettre une lecture claire et sans équivoque des dispositions testamentaires.

 
c. Daté de la main de son auteur

La date est également un des éléments majeurs du testament car elle permet, en cas de pluralité de testaments, de déterminer le testament qui sera pris en compte dans le cadre de la succession.

Elle permet aussi de vérifier la capacité du testateur au moment de la rédaction du testament.

Il s’entend par date du testament l’année, le mois et le jour. L’heure n’est pas requise. La date peut être écrite, en chiffres, en lettres, en chiffres et en lettres.

La fausseté de la date est assimilée à l’absence de date et emporte la nullité du testament. La date du testament fait foi jusqu’à preuve contraire. L’enregistrement fiscal n’est pas requis pour donner date certaine au testament.

En principe, à défaut de disposition particulière, le testament le plus récent remplace et supprime les précédents, s’il n’y pas lieu à les interpréter les uns par rapport aux autres, parce que plusieurs testaments peuvent se concilier les uns avec les autres. Pour éviter les complexités, il est recommandé au testateur de préciser son intention de révoquer ou maintenir les dispositions testamentaires antérieures. Les testaments qui interprètent ou précisent des précédents sont désignés dans le jargon notarié sous le vocable de codicille.

Le juge peut rectifier une date erronée lorsqu’il s’agit d’une erreur matérielle du testateur ou lorsque la date du testament peut être déterminée d’une manière précise et non approximative.

La charge de la preuve concernant la contestation de la date incombe aux héritiers (Cass. Civ., 11 Juin 1902, GAJC, 11ème édition n°122-123).

La jurisprudence considère qu’une date incomplète du testament peut être validée lorsque la date peut être reconstituée par des éléments intrinsèques ou extrinsèques au testament (Req., 4 Juin 1934 : DH 1934.460).


d. Signé de la main de son auteur

La signature est la désignation habituelle d’une personne. Cela permet au disposant d’attester que ce qu’il a écrit est l’expression de sa dernière volonté. La signature permet ainsi de confirmer la volonté du testateur. Il s’agit d’une condition de validité de l’acte.

Ont été validés comme valant signature, le nom patronymique, le nom et le prénom, le nom de jeune fille d’une épouse, un prénom, un sobriquet, un pseudonyme ou un surnom, si le testeur est connu sous celui-ci.

La Cour de Cassation a exprimé : « même si elle ne constitue pas la signature habituelle du testateur, la mention de la main de celui-ci de ces nom, prénom au bas du testament ne laisse aucun doute sur l’identité de l’auteur ni sur sa volonté d’en approuver les dispositions. » (Cass. Civ. 1ère, 22 juin 2004 Bull. civ. I, n°180, D 2004, 2953 note M. NICOD)

Il est généralement admis pour la validité du testament que la signature de son auteur doit figurer en fin d’acte (Cass. Civ. 1ère, 14 janvier 2003, Bull. civ. I. n°14 ; Cass. Civ. 1ère, 17 février 2004, Bull. civ. I n°55).
 

e. Le support du testament

La loi ne formule aucune précision à ce sujet. Il n’y a pas à ajouter une condition que n’exige pas la loi. La règle est constante.

Le testament olographe peut être écrit sur une lettre, une enveloppe, un papier. Il est admis également qu’il soit rédigé sur un carnet (Lyon, 4 janvier 1923 : DP 1923.2.182), un cahier (Paris, 19 avril 1983 :  JCP N 1983. II. 310), une carte postale interzones sous l’Occupation (Cass. Civ. 1ère, 24 Juin 1952 : D 1952.613 ; JCP 1952 II. 7179, note Voirin), au dos d’une police d’assurance (Cass. Civ 1ère 6 mai 1891. DP 1893.1.177) sur un parchemin.

Le juge doit, tout de même, vérifier s’il ne s’agit d’un simple projet de testament. La rédaction du testament doit, en effet, être guidée par un animus testandi c’est-à-dire une réelle volonté de gratifier un légataire par cet acte (Pau, 20 avril 1961.397).
 

f. Les ratures et additions

Si elles sont contemporaines de l’établissement du testament elles n’ont pas à être signées et datées du testateur. Les règles relatives aux actes notariés ne leur sont pas applicables. Si les ratures et additions sont postérieures à la rédaction du testament, elles doivent sous peine de nullité être signées et datées. Les additions qui interprètent ou explicitent sans révoquer ni ajouter de nouvelles dispositions testamentaires ne sont pas assujetties à ce formalisme.  
 

2. Le contrôle de validité du testament

Le danger réside dans l’insécurité qui découle du fait que le testament olographe est rédigé de la main du testateur et conservé par ce dernier. En effet, un testament olographe est susceptible, lorsqu’il est conservé au domicile du testateur, d’être détruit par un héritier non gratifié qui trouverait le testament ou d’être perdu.

Le testament est un acte personnel et spontané du disposant. Le juge doit donc vérifier que l’acte n’est pas vicié par l’intrusion d’un tiers (suggestion) dans la rédaction du testament manifestée par une écriture différente.

Le graphisme de l’écriture du testament doit, par conséquent, être étudié avec précision lorsqu’il s’agit d’un testament olographe. Le mélange des écritures peut amener à penser que le testateur a subi une influence étrangère.

Une pratique répandue pour éviter les nullités consiste à demander les conseils d’un notaire lors de la rédaction du testament olographe. Ce testament ne constitue pas un testament authentique quand bien même il est réalisé au sein d’un office notarial car il conserve les conditions de forme d’un testament olographe. Cela permet de rassurer le testateur concernant le respect des règles de validité du testament et de publier ce testament au fichier central des dispositions de dernières volontés afin d’être sûr qu’il soit bien pris en compte lors du règlement de la succession du testateur.
 
  • Le testament à main guidée
Il existe, cependant, une jurisprudence concernant le testament « à main guidée ». Cette jurisprudence est apparue dans un but d’équité afin de permettre également aux personnes dont le physique est affaibli de rédiger leur testament olographe.

Le testateur peut, dans ce cas, se faire assister par un tiers dans la rédaction de son testament olographe. Le juge doit exercer un contrôle très strict, qui peut s’avérer délicat, car il doit s’assurer que le tiers n’a pas tenté d’influencer le testateur. Deux conditions nécessaires à la validation par le juge du testament « à main guidée » ont été déterminées par la jurisprudence.
L’écriture du testateur doit, tout d’abord, être identifiée.

L’aide du tiers doit rester une simple assistance matérielle pour former les lettres et permettre une écriture intelligible des mots composant le testament. La seconde condition tient dans la certitude que le testament ait exprimé la volonté propre du testateur et non celle du tiers.

Une des conditions que le juge doit vérifier pour confirmer la validité du testament est la capacité du disposant à le rédiger.

Le juge doit, en cas de doute sur la capacité du testateur, vérifier dans son dossier médical qu’à la date de rédaction du testament, il était en pleine possession de ses facultés mentales, cognitives.

Les actes médicaux pratiqués et les maladies décelées chez le testateur sont des éléments essentiels pour le juge qui se base ainsi sur son dossier médical pour affirmer l’insanité d’esprit du testateur et, par conséquent, frapper de nullité absolue le testament.
 
3. La conservation du testament olographe
 
 
a. Dépôt du testament chez notaire du vivant du testateur

Tout notaire peut accepter le dépôt d’un testament olographe sans considérer que l’acte a été reçu par lui. Dans l’hypothèse de ce dépôt les règles d’incapacité des notaires n’ont pas à être appliquées (Requête, 24 juin 1926, D 1926.1.83 et S 1925. 1. 181). En acceptant le dépôt du testament le notaire doit avertir de l’existence du testament les légataires qu’il connaît (Caen 4 mai 1910, D 1911.55.6 ; Seine, 3 déc. 1923. D 1924.2.152 et S 1925. 1. 181).
 
b. Publication du testament olographe

Lors du dépôt du testament chez notaire celui-ci doit en assurer la publicité au Fichier Central des Dispositions de Dernières Volontés. Le fichier est à l’usage interne du notariat et permet au notaire chargé du règlement d’une succession d’interroger le fichier pour savoir si un testament a été établi par le défunt.

c. Dépôt du testament chez notaire après décès

L’article 1007 du code civil modifié par la loi n°66-1002 du 28 déc. 1966 prévoit : "tout testament olographe ou mystique sera, avant d’être mis à exécution, déposé entre les mains d’un notaire. Le testament sera ouvert, s’il est cacheté. Le notaire adressera une expédition de celui-ci et une copie figurée du testament au greffier du tribunal de grande instance du lien d’ouverture de la succession, qui leur accusera réception de ces documents et les conservera au rang de ses minutes". Cet article créé une obligation à toute personne qui découvre un testament de le déposer entre les mains du notaire chargé de la succession.
 
 

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